jeudi 14 avril 2011

MESSIO-MEUSSIO ou ZIDOGBABOUO

MESSIO-MEUSSIO ou ZIDOGBABOUO

Aujourd’hui, je voudrais faire une petite pause pour prier pour les morts de cette barbarie inutile de ces derniers temps : je ne voudrais pas les trier, ils ont tous du prix aux yeux de Dieu. Je le ferai par les paroles et la voix d’un artiste célèbre du pays Bété, Amédée Pierre, à qui René Babi a rendu hommage dans un bestseller, Amédée Pierre, le Dopé National, grand maître de la parole (Paris, l’Harmattan 2010). Parmi tous ces morts, il y a de fortes personnalités comme Désiré Tagro, Voho Sahi, …d’autres que la rumeur ont donné pour morts (Maître Hamza, Jean-Jacques Béchio, Mamadou Ben Soumahoro) et que je ne peux confirmer à présent. D’autres anonymes d’hécatombe comme ceux de Duékoué et du village du footballeur Drogba Didier…Je m’incline respectueusement devant vos corps et je vous offre au Seigneur, dans une eucharistie digne et majestueuse. Certainement, vous parlerez d’une seule voix devant Dieu, pour que notre jeune nation retrouve rapidement sa splendeur d’antan. Vous n’êtes pas tous Bétés, mais pour vous, je chanterai par la voix d’Amédée Pierre, la chanson Moussio-Moussio, cette belle mélodie soutenue par un rythme reposant, mais terriblement poignant pour l’âme sensible.

1) LA CHANSON EN BETE

Meussio meussio,

Léyérégbolou, yê meussio(bis) gnia

Léyérégbolou yê meussio-lé

Gou-ô da-ho na winé-ho

Léyérê gbolou, léyéré gbolou

Léyéré gbolou yê meussio

Fê ! Fê Fêkahouan moa n’sabha-lé

Gou-ô da-ho meu-lê na sa-ho

N’lê gou goualé édji

N’nè néyi ato ziané lê

Gou goualé dé gnamon namia-lê

Bha zidogbabouo lebha-ho

Zidogbabouo, Zidogbabouo

Zidogbabouo lebha-ho

Nou-ho noubheu-ho

Alé n’y ê noubheu-ho

A meu gou ô zidogbablé meu zré-lé

Alé n’y ê noubheu-ho

A meu gou ô zidogbablé meu zré-lé

Alé n’yê noubheu-ho(gnia)

Gnia-ho na gou-ho

Ato-ho nagou-ho

Alé n’y ê noubheu ho

Zidogbablé né yiogboté

Mé na gou sassa né-ho

Sassa né-ho sassa né-ho

Mé na gou sassa né-ho »

2) LA TRADUCTION EN LANGUE FRANÇAISE

« Il brûle ! Il brûle !

Mon trésor s’est consumé !

On a mis le feu au tronc d’arbre

Qui renfermait notre richesse ;

On a tué ma fille, ma richesse potentielle.

Se tournant vers sa femme, il lui dit :

Toi, mère de l’enfant, ne pleure pas.

Ce n’est pas à toi que je m’adresse (dans mes pleurs),

Je m’adresse aux fumistes et aux sorciers

Je m’adresse à ceux qui ont tué mon enfant,

Oui, c’est à eux que je m’adresse et non à toi,

Quand l’idée m’était venue de faire un enfant,

Je pensais perpétuer le nom de mon père…

Quand l’idée m’était venue de faire un enfant,

Je pensais perpétuer le nom de ma mère…

Pour une femme qui accouche,

Il ya toujours des dangers à l’accouchement :

Les soldats de la mort sont présents, qui attendent :

En cas de dérapage, ils emportent la parturiente

J’ai compris. J’ai compris…Oui, j’ai compris

Le jour où mon enfant allait au pays des Morts,

Oui, ce jour là

J’ai compris que la jalousie existait,

Maman, et mon enfant ?

J’ai compris…

Papa, et mon enfant ?

J’ai compris…

Mon enfant, le voilà est en train de parcourir

Les carrefours du pays des Morts.

Les carrefours du pays des Morts,

C’est ce que mon enfant est en train de parcourir »

(Sous-entendu : ne sachant de quel côté aller pour retrouver nos ancêtres, semble dire le père, en soupirant, broyé par la douleur).

3. LA PHILOSOPHIE DE LA MUSIQUE

La place particulière qu’occupe la musique dans les différents arbres de la philosophie, depuis l’Antiquité donne à cet art, une place à part, privilégiée qu’il est par bien des philosophes dont certains furent également des compositeurs, comme Rousseau ou Nietzsche, et d’autres, comme Jankélévitch. Nous partirons de la question que pose Roberto Casti, lors du colloque sur Musique, rationalité, langage : l’harmonie a du monde au matériau : « La musique est-elle un langage en un sens plus générique ? » Il répond que la musique possède une syntaxe en un sens technique et a un contenu sémantique. Dire que la musique possède une sémantique, c’est-à-dire qu’elle a la capacité de représenter (p. 128). Dans la chanson d’Amédée Pierre, la musique représente une entité réelle : la mort.

Miono Lobo une belle jeune fille a été chassée du village par jalousie avec son mari. Ils se réfugièrent dans la forêt et peu de temps après elle tomba enceinte et mit au monde un enfant mâle. De retour au village, l’enfant fut tué par une amie d’enfance. C’est alors qu’intervint le mari qui fit cette lamentation.

Cette lamentation, ce n’est pas seulement les pleurs d’une mère ou d’un père qui perd son fils unique ; ce sont aussi les pleurs de chacun de nous, les pleurs de l’Afrique qui pleure aujourd’hui ses vaillants guerriers.

Aucun commentaire: